mardi 25 août 2015

Double Chronique - Jean-Paul Nozière : La chanson d'Hannah / Thierry Jonquet : La vigie




La chanson de Hannah de Jean-Paul Nozière

Août 1940. Louis, dix ans, fils d'émigré polonais, partage sa vie entre les corons, le quartier des mineurs de charbon, et le Café des Amis, tenu par madame Jeanne. Il rend de menus services aux clients du café, qu'il entend parler de la guerre, sans vraiment s'en soucier. Mais avec la défaite française, l'occupant nazi et la police comment à arrêter les Juifs. Louis apprend alors par son père qu'il est lui-même juif.

MON AVIS :

La découverte de ce livre s’est faite au détour d’une conversation avec des collègues. Je dois avouer qu’au premier abord, ce livre ne me tentait absolument pas : le titre ne m’intriguait pas, le thème des juifs et de la seconde guerre mondiale me semblait vu et revu. Néanmoins, étant au programme de 3ème, je me suis trouvée obligée de m’y intéresser et au final, je ne regrette pas du tout.
Pour commencer, je dois quand même dire que la couverture est affreuse. Ces tons marron ne donnent absolument pas envie d’ouvrir ce roman. Les dessins sont bien faits mais le visage du petit garçon en gros plan ne me plaît pas du tout. C’est la première chose que l’on voit et même s’il est joli, ça n’est pas attrayant. Pour moi, cette couverture est à revoir de A à Z !
Mais vous connaissez tous l’adage « Don’t judge a book by its cover » (ne jugez pas un livre sur sa couverture). Dans le cas de ce roman, il s’applique d’autant plus. La couverture est pour moi un critère de choix et ici, heureusement que je ne m’y suis pas arrêtée. Ce n’est pas le livre du siècle mais il se lit très facilement et l’histoire est satisfaisante.
Les personnages sont presque attachants. J’ai lu le livre si vite que je n’ai pas eu le temps de « créer un lien » avec eux. En tant que lectrice, j’avais néanmoins envie d’ouvrir les yeux au jeune Louis qui me paraissait naïf. Louis ne reste pas moins un personnage surprenant et plein de ressources.
J’ai aimé suivre son histoire qui est très émouvante même si l’écriture ne l’est pas réellement. Le style d’écriture très simple permet de donner un ton plus léger au roman bien qu’il aurait été bienvenu de voir plus d’émotions transparaître.
En quelques mots : une histoire écrite simplement mais qui véhicule le devoir de mémoire d’une jolie façon.



La vigie de Thierry Jonquet

En ce 11 novembre 2000, quelque chose ne va pas du tout dans la ville de Feucherolles-Les-Essarts : où est donc passé l'cabot chef, le vieux Laheurtière ? Ça ne lui ressemble pas, de ne pas être là – tout le monde sait bien que pour lui, le 11 novembre c'est sacré. On monte chez lui, pour le trouver bel et bien mort ! Nous voilà alors plongés dans le récit de la vie du Caporal-chef André Laheurtière. Un destin résolument marqué par la Grande Guerre et intimement lié au devenir de cette bonne ville de Feucherolles. Feucherolles où, comme dans toute municipalité qui se respecte, les magouilles de tous genres vont bon train. Ainsi le Maire, trop pressé de faire des affaires avec les promoteurs, a fait fi de toutes les lettres d'avertissement que le vieux Laheurtière lui a envoyées des mois durant. Et soudain, la catastrophe s'abat sur la petite ville, les drames s'enchaînent. Pourquoi ? Seul Marcel Bourgier, ancien combattant de Bosnie, sera assez tenace pour découvrir, avec la complicité de l'ancienne compagne du “Vieux“, la clé du terrible mystère qui ne cessera peut-être jamais de hanter Feucherolles… Un ton résolument grinçant, un regard sans complaisance sur une France minable... C'est là où le réel et l'imaginaire s'effleurent, comme pour brouiller les pistes de nos consciences, que Chauzy et Jonquet ont planté de mains de maîtres le décor de cette tragi-comédie sans pitié mais, heureusement, complètement surréaliste.

MON AVIS : 
 
Tout comme le livre présenté précédemment, j’ai découvert ce livre au détour d’une conversation avec mes collègues (en fait, on a parlé de ces deux romans en même temps… et de tellement d’autres !).
Pour ce roman, mon avis sera plutôt succinct : il y a 80 pages environ et ces dernières ne m’ont pas énormément plu. L’idée de base est bonne : se servir de la première guerre mondiale pour évoquer des vieux souvenirs à une époque où on commence un peu à oublier cette période sombre. C’est ce que dénonce ce roman : seuls les plus âgés et ceux y ayant pris part continuent d’aller aux célébrations du 11 novembre. C’est bien entendu une généralité mais l’auteur en profite pour faire un portrait assez noir de la société.
Pourtant, je ne voyais pas où voulait nous emmener l’auteur. La guerre est très peu évoquée, les personnages sont particuliers et antipathiques… Le parallèle entre 1914 et les années 2000 est bien fait mais il aurait pu être mieux amené selon moi. L’enquête de Marcel est intéressante, le résultat malsain et consternant : la société est amenée à reproduire les mêmes erreurs…
Au final, ce roman se lit vite quand on arrive à rentrer dedans. Personnellement, j’ai eu beaucoup de mal à m’y mettre et je reste sur un ressenti amer. Je suis loin d’avoir été convaincue.


samedi 22 août 2015

Silène Edgar et Paul Beorn : 14-14



 

14-14

Hadrien et Adrien, deux garçons de 13 ans, habitent à quelques kilomètres l'un de l'autre en Picardie. Tous deux connaissent des problèmes à l'école, des troubles sentimentaux, des litiges avec leurs parents. Une seule chose les sépare : un siècle. Leurs destins vont se mêler et une faille temporelle leur permet d'échanger du courrier...

MON AVIS :

Une jolie couverture, un titre simple mais percutant, une quatrième de couverture attrayante, de bons avis sur la blogo : tout était réuni pour une bonne lecture. Aussitôt arrivé dans ma PAL, aussitôt sorti, il m’aura fallu deux jours lire ce roman. J’ai beaucoup aimé mais j’en suis aussi ressortie légèrement déçue. J’attendais de trouver certaines choses au sein de cet ouvrage. Quand je me suis rendue compte que je ne les aurais pas, je me suis sentie flouée !

Le principe de l’histoire m’a séduite : deux jeunes garçons correspondent par lettre : l’un vit en 1914, l’autre en 2014. C’est le seul élément magique de l’histoire mais il change tout. Les deux garçons, Adrien et Hadrien, ne se rendent pas tout de suite compte qu’un siècle les sépare et qu’en réalité, ils ne se connaissent pas. Leur amitié très longue distance fait la force du roman. On voit deux adolescents qui vivent des choses très différentes mais qui se parlent, s’acceptent et s’entraident. Grâce à eux, nous sommes témoins de l’évolution radicale de la vie quotidienne. Néanmoins, j’aurais aimé que ce soit plus développé. 

En effet, même si la quatrième de couverture ne nous promet rien à ce sujet, je m’attendais à ce que la Grande Guerre prenne une place beaucoup plus importante dans le récit ainsi que les divers aspects de la vie en 1914. Nous avons quelques éléments à nous mettre sous la dent mais pas suffisamment à mon goût. Soit ils sont légers soit ils arrivent trop tard dans le récit.

De plus, le récit se centre énormément sur Adrien (2014) et ses histoires de cœur adolescentes. Personnellement, ce côté-là de l’histoire ne m’a pas plu, je l’ai trouvée trop enfantine. Peut-être suis-je déjà trop vieille pour adhérer à cette façon de décrire les premiers sentiments amoureux. Si cela m’a gêné à la lecture, avec le recul je me dis que cet effet est volontaire de la part des auteurs : en 1914, les soucis des gens étaient tout autre : les histoires d’amour sont certes importantes mais elles ne sont rien à côté des problèmes d’éducation, de transports, de soins médicaux. C’est là que réside la différence majeure entre les deux garçons : ils n’ont pas les mêmes préoccupations.

Pour terminer : j’ai été frustrée par la fin. Elle est prenante et très belle mais j’aurais tout de même aimé en savoir un peu plus sur Hadrien (1914). Au final, j’ai tout de même beaucoup aimé et je ne regrette pas du tout d’avoir craqué pour ce roman, sur un petit coup de tête.




mardi 18 août 2015

Jack London : Croc-Blanc





Croc-Blanc 

Fils d'une louve et d'un chien de traîneau, Croc-Blanc connaît bien la loi du Grand Nord : manger ou être mangé.
Sa rencontre avec les hommes, ces dieux faiseurs de feu sera décisive. Sous l'autorité de son premier maître, il devient chien de traîneau. Mais un autre maître, sanguinaire et brutal, l'engage dans de cruels combats et réveille sa sauvagerie. De l'instinct du loup ou de celui du chien, lequel l'emportera ?

MON AVIS :

Il y a très longtemps que j’entends parler de Croc-Blanc et de son auteur Jack London. J’étais intriguée par ce roman classique destiné à la jeunesse qui reçoit encore aujourd’hui beaucoup de bonnes critiques. Je me suis enfin lancée cet été !

Tout d’abord, j’ai eu un peu de mal à rentrer dans l’histoire. Alors que Croc-blanc est le nom du héros et le titre du roman, je m’attendais à le rencontrer directement. Il est plutôt classique de tomber directement (ou presque) sur le héros principal. Or, ici, les cinquante premières pages ne le concernent pas directement. En effet, l’auteur prend le temps de nous expliquer d’où vient Croc-Blanc. Ainsi, nous faisons d’abord la rencontre de ses parents et nous assistons à sa naissance. C’est un peu lent mais ça n’en est pas moins intéressant car nous découvrons la vie sauvage des loups. Par la suite, Croc-Blanc se fait apprivoiser et c’est à partir de ce moment que j’ai réellement accroché à l’histoire.

Ce qui m’a le plus impressionné est la façon dont Jack  London a écrit son roman. Nous avons accès aux pensées du loup, à ses envies, ses désespoirs, ses peurs. Ecrire en se mettant à la place d’un être humain n’est déjà pas facile alors se mettre dans la peau d’un loup a du demander un certain travail. De plus, il fallait que le comportement du loup et des autres chiens soit plausible, réaliste. Jack London a merveilleusement bien réussi son pari. Je n’ai eu aucun mal à imaginer les scènes de poursuites, de courses, de combats… Je n’avais plus des mots sous les yeux mais des loups, des chiens et des hommes plus ou moins humains.

On s’attache forcément à Croc-Blanc. Ce loup a un caractère bien trempé et même s’il ne nous donne pas forcément envie de le cajoler, on a envie de le protéger. Jusqu’au bout, je me suis demandé comment le roman allait se terminer, comment Croc-Blanc finirait. Je n’avais presque pas envie de tourner les dernières pages, tellement j’ai apprécié suivre le cours de sa vie. Il n’a pas toujours été facile d’être témoin de son histoire mais les dernières pages sont vraiment belles. La dernière ligne du roman est très jolie aussi : pour moi, elle reste assez ambiguë et laisse le lecteur choisir. De plus, avec cette manière de faire, on peut dire que la boucle est bouclée ! 

En quelques mots : malgré un début difficile, je ressors enchantée de cette lecture qui est à la fois dure et jolie. De plus, je l’ai trouvée très originale. Un classique qui ne peut pas se démoder et qui vous fait voyager dans le Grand Nord !

vendredi 14 août 2015

Annie Ernaux : La Place





La Place


Annie Ernaux fait le portrait de son père et partant celui du monde rural de ses origines avec lesquels, au fur et à mesure où elle accède à un univers plus petit bourgeois (le récit commence par le souvenir de son épreuve du Capes), elle prend insensiblement ses distances. Un récit distancié, sans affect ni jugement, qui témoigne admirablement de ses rapports ambivalents avec son père, à la fois fier de la réussite de sa fille et méfiant à l'égard de ce monde qu'il ne comprend pas. Pourtant, en dépit de ce parti pris stylistique, l'émotion se trouve à chaque page, l'intime est dit avec une très grande pudeur.

MON AVIS : 

Cette lecture, je l’ai réalisée dans un but bien précis. Ce roman, on peut le faire étudier à une classe de troisième. Etant professeur à ce niveau, je me suis intéressée au roman d’Annie Ernaux. Cependant, même si je n’ai pas détesté (ni adoré), je ne le ferai pas étudier cette année. J’ai apprécié mais plusieurs petites choses m’ont gênée.

Ce roman autobiographique raconte les souvenirs d’Annie Ernaux de son père et de cette relation qui les unissait. Son père est central, tout comme la figure maternelle est centrale dans le roman d’Albert Cohen Le Livre de ma mère. Ce petit détail me fait sourire car d’un côté nous avons un fils qui raconte sa mère et de l’autre, une fille qui raconte son père. Néanmoins, tous les deux ont vécu des choses différentes et nous ne lisons pas du tout la même histoire. Alors qu’Albert Cohen fait une véritable déclaration à sa mère, Annie Ernaux est plus impersonnelle.

En effet, Annie Ernaux nous raconte son enfance et cette figure paternelle dure mais qui l’a toujours soutenue. Elle nous explique toutes ces petites choses si importantes pour lui. Pourtant, j’ai eu l’impression que c’était assez négatif. Il était primordial pour lui de faire attention au coût de chaque chose (ce qui est compréhensible, on y fait tous attention !) mais surtout il faut prêter attention au regard des autres et ne jamais montrer notre infériorité. Cette question d’infériorité m’a beaucoup dérangé : se rabaisser sans cesse n’aide personne. 

En parallèle, on comprend tout de même que le père veut ce qu’il y a de mieux pour sa fille : même s’il ne comprend pas son attrait pour les études, il la pousse à toujours aller plus loin. Même s’il est gêné qu’elle ne travaille pas à l’usine ou ailleurs, il est conscient que ses études la rendront supérieure. Pour un homme qui souffre d’un complexe d’infériorité, rien ne pouvait être plus beau. Il insiste sur l’importance du langage, de l’instruction. Et en ce point, il en est touchant.

Néanmoins, j’ai trouvé que le style était assez impersonnel. Je n’ai trouvé aucune réelle émotion à travers les mots d’Annie Ernaux. Tout nous est raconté sans fard mais une dose de sensibilité aurait été la bienvenue. Durant la première moitié du roman, j’ai eu du mal à me faire à cette façon d’écrire. De plus, certaines tournures de phrases étaient courtes et, selon moi, écrites de façon alambiquée. Ça n’est pas gênant pour la compréhension mais ça m’a déconcertée. 

En quelques mots : une lecture agréable et rapide mais qui ne peut pas plaire à tout le monde. J’en ressors mitigée !